(HBO) un téléfilm de 118 minutes diffusé le 26 mai dernier
J’en vois déjà certains la bouche grande ouverte et le doigt crispé sur la souris : « Keuwah ! Tu nous abandonnes en rase campagne et cours t’abriter sous la bannière du septième art ?! » Non, je n’ai pas l’intention de me mettre à parler cinéma sur ce blog (quoique la frontière est parfois mince) et si Ma vie avec Liberace a connu les honneurs d’une sélection en compétition officielle parmi la dernière édition du Festival de Cannes, ce n’en est pas moins un téléfilm !
La plupart des critiques que vous pourrez lire sur le sujet feront mine de s’émouvoir sur le destin de ce film qu’Hollywood ne voulait pas, obligeant ainsi le prolifique Steven Soderbergh a se tourner vers HBO pour aller au bout de ce projet ! Loin de moi l’idée de contester la possibilité (malheureusement trop probable) d’un rejet de ce film si explicitement homosexuel par l’industrie cinématographique mais je préfère y voir la réussite (le film a battu le record d’audiences obtenu par Game Change l’an passé) de la chaîne câblée qui franchit ainsi un nouveau cap vers son désir de produire les plus belles productions sur le petit écran.
Voyez-vous, le sériephile n’est pas dépourvu de mémoire (bien au contraire, il aurait même plutôt intérêt à se souvenir des épisodes précédents…) et il sait tout l’investissement qu’a consacré HBO à l’exécution de fictions de qualité. Il peut d’ailleurs citer avec aplomb Mildred Pierce, une brillante minisérie que l’on doit au cinéaste Todd Haynes, et qui avait d’ailleurs obtenu un prix à Cannes (pour Velvet Goldmine, CQFD…).
Liberace était un pianiste virtuose qui jouait déjà à l’âge de 4 ans. Le film n’est pas un biopic au sens strict du terme puisqu’il s’intéresse surtout à la fin de carrière de l’artiste et plus précisément à sa relation avec un jeune éphèbe. Le titre français du film fait d’ailleurs référence au récit de ce partenaire (Behind the Candelabra : My life with Liberace) paru en 1988. Le film adopte justement le point de vue de ce jeune provincial, élevé dans un ranch et doué pour soigner les animaux, qui va connaître une folle histoire d’amour avec un Liberace alors au firmament (il touchait les cachets les plus importants au monde à l’époque).
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Steven Soderbergh est un habitué du Festival de Cannes (il y a obtenu la palme pour Sexe, Mensonges et Vidéo) et Liberace est le septième film qu’il y présente (toutes sélections confondues). Au delà du sujet et des acteurs, retrouver ce film en compétition était aussi l’occasion pour le comité de séléction et Thierry Frémaux d’affirmer un certain soutien envers un réalisateur qui annonçait récemment vouloir raccrocher. Sans aller jusqu’à la retraite anticipée, Il a peut être tout simplement le désir de faire autre chose et cela semble se confirmer puisque l’on apprend ces jours-ci qu’il souhaiterait réaliser une série à destination de la chaîne Cinemax (petite soeur d’HBO).
On reconnaît directement son style dans ce téléfilm qui fait la part belle à une image aux tons chauds (filtre jaune) et le souci du détail. Avec Liberace, il avait justement là un personnage qui se complaisait au milieu de parures et de strass, cumulant toutes matières pourvu qu’elles soient brillantes et tape-à-l’oeil (une aubaine pour réalisateur méticuleux) !
Le talent de Soderbergh, c’est aussi de constituer des castings qui font la différence ! Le duo Michael Douglas / Matt Damon ne déroge pas à la règle. Douglas est fantastique dans son phrasé, sa gestuelle et la transformation à laquelle il s’astreint pour camper ce rôle. Cette performance l’aurait logiquement placé en position de choix pour l’Oscar (mais ce ne sera, à priori, pas le cas car le film ne devrait pas sortir en salles là bas). Damon est, pour sa part, un habitué des films de Soderbergh et il élargit encore un peu plus sa palette d’acteur pourtant déjà très complète.
On remarque également des seconds rôles plutôt croustillants comme Scott bakula dans un rôle de folle à moustache parfaitement naturelle et surtout Rob Lowe, en chirurgien esthétique vénéneux et méconnaissable ! Ils ont tous les deux en commun d’avoir une expérience télévisuelle prononcée et c’est souvent une caractéristique des choix de casting de Soderbergh. C’est ainsi l’occasion de les voir à contre-emploi mais toujours avec réussite.
Au final, ce Liberace n’est pas aussi exceptionnel que les traîne de ces manteau de scène. Dans la filmographie récente de Soderbergh, je garde un bien meilleur souvenir de Magic Mike par exemple.
On retient toutefois que le personnage, malgré une certaine évidence de comportement, avait toujours nié son homosexualité et, dans le contexte actuel, cette histoire d’amour même si elle ne se finit pas bien, porte un message fort !
Visuels & Vidéo : Behind the Candelabra / HBO