Silicon Valley s01e08 « optimal tip-to-tip efficiency »

(HBO) saison 1 en 8 épisodes et saison 2 prévue –
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Vous avez peut être déjà lu divers avis sur Silicon Valley dont la saison initiale s’est achevée le 1er juin après huit petits épisodes. Ces critiques associent le plus souvent la comédie HBO avec le qualificatif Geek et le champ de la parodie. Ne vous laissez pas empapaouter par ces analyses un peu trop rapides.
Silicon Valley n’est pas sans défauts mais elle s’avère proposer une description très juste de la sphère startupienne à Palo Alto et plus largement une réflexion sur un lieu de travail spécifique encore en manque de représentation.

Ce qui suit ne contient sans doute pas de révélations mais si vous n’avez pas encore vu la série, je vous conseille plutôt de lire cette présentation !

Richard Hendricks est un développeur introverti qui travaille dans une compagnie mastodonte à la Google, et dénommée ici Hooli. En dehors des heures d’open space, il passe son temps dans un incubateur installé dans un pavillon de la région. Le propriétaire, Erlich bachman, y héberge des jeunes talents dans le but de récupérer un pourcentage sur leur futur réussite.
Erlich est très critique vis à vis de Richard. L’application musicale qu’il développe n’intéresse personne. Mais tout change lorsque l’on découvre qu’elle contient un algorithme de compression révolutionnaire…

Le microcosme des faiseurs d’applications connectées est une authentique tendance du champ sériel actuel. Citons par exemple Murder in the First qui débutait la semaine dernière sur TNT et dont l’un des personnages principaux est un jeune chef d’entreprise au dents longues de la Silicon Valley justement.
Pourtant, il y a peu de représentations sincères de cet univers. The Social Network constitue la seule exception notable auquel il faudrait peut être ajouter Betas, dont on se souviendra surtout pour être la première série originale abandonnée par Amazon (après une saison).

“You can’t call it satire when you are showing it like it is” (Mike Judge sur Re/code)

Mike Judge est un observateur pointilleux de la société américaine. On se souvient de son véritable pamphlet qu’était Beavis & Butt-head sur MTV. Il avait également jeté un regard acide sur l’univers du lieu de travail dans son film Office Space (en 1999).
Avec Silicon Valley, Judge aborde un lieu qu’il a brièvement connu à la fin des année 80. Il se fait alors engager dans une petite structure à Sunnyvale au coeur de la fameuse vallée. Mais il n’y restera que peu de temps, comprenant rapidement qu’il est en complet décalage avec ses collègues : “They loved the Grateful Dead; he was into Run DMC” (source : Wired).
Il constate aujourd’hui, comme à l’époque, qu’au sein de cette ruée vers l’or contemporaine, les personnes les plus à même de réussir sont aussi celles qui sont le moins en mesure de digérer le succès. L’actualité regorge d’exemples confondants comme Sean Parker ne reculant devant rien pour s’offrir un mariage dans le plus pur style du… Hobbit !

On mesure alors combien il y a là un terreau propice à la comédie. Mais pour avoir lui-même été ingénieur, Judge souhaite d’abord être authentique. Il engage une équipe en amont pour blinder les répliques concernant l’algorithme de compression, il s’incruste à Mountain View pour en saisir toute l’ambiance et assiste au Techcrunch Disrupt pour le retranscrire fidèlement.

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« It was like watching a bizarro version of your own reality » avouera Elon Musk (source : LATimes).

Le résultat est si précis qu’il évoque plus souvent un format documentaire qu’une comédie. Avant de forcer le trait, le récit suit d’abord une direction réaliste et Silicon Valley se différencie naturellement des codes habituels du dramedy.

Silicon Valley is a show that manages to be stupid and smart at the same time” (Les Chappell / The AV Club)

Traversée par un humour au niveau du slip qui n’est pas sans rappeler Beavis & Butt-head, Silicon Valley est pourtant fascinante pour son sous-texte social.
La série évoque pêle-mêle l’absurdité du racisme ordinaire (Erlich et Dinesh le mexicain), le vampirisme des grosses structures prêtes à tout pour rester dans le coup (Hooli), les motivations peu avouables derrières les décisions stratégiques des décisionnaires (Belson Vs. Gregory), la vacuité du discours des communiquants (les présentations TED & Techcrunch) , la placardisation en entreprise (Big Head chez Hooli) ou bien la culture du chacun pour soi.

Jared is the new Kenny
Comme souvent avec HBO, le propos n’est pas consensuel, loin de là ! L’ambiance est presque exclusivement masculine. Les rares personnages féminins ne sont guère valorisants.
Et puis dans un souci d’exactitude des dialogues évoquée plus haut, la série n’hésite pas à employer le jargon technique du métier. De quoi déstabiliser une bonne partie du public.
Pourtant, l’humour est très largement accessible. Le casting possède un fort contingent de comiques habitués de la scène. Le duo T.J. Miller (Erlich) et Kumail Nanjiani (Dinesh), habitués du stand-up, sont notamment très drôles. La prestation de Zach Woods dans le rôle d’un Jared en perdition est elle aussi savoureuse.

En huit épisodes, Silicon Valley dessine avec finesse les contours d’un univers paradoxalement peu accessible au profane. Elle le fait de manière si juste et sincère qu’il est désormais acquis qu’il y aura un avant et un après Silicon Valley !

Visuels : Silicon Valley / HBO

 

3 commentaires sur « Silicon Valley s01e08 « optimal tip-to-tip efficiency » »

  1. Je suis contente de m’être accrochée parce que finalement j’ai beaucoup aimé (et notamment pour Jared !), mais c’est vrai que ne connaissant pas la réalité, on peut avoir du mal à démêler ce qui est réaliste de ce qui est exagéré !

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