(Amazon Originals) la saison 1 compte 10 épisodes –
Transparent est la troisième série originale d’Amazon à voir le jour sous la forme d’une saison complète et ce n’est pas faire injure à Alpha House et Betas – les deux précédentes – que d’affirmer qu’elle est surtout la première série d’importance, le premier coup d’éclat du mastodonte de la vente en ligne. De plus, elle nous parvient au milieu d’une nuée de critiques dithyrambiques la propulsant systématiquement comme LA meilleure nouveauté de cette rentrée.
Transparent se propose d’aborder la sexualité au sens très large, et sans entrer dans les détails à ce stade, la liberté de ton de la série est tout simplement fabuleuse. Mais au delà de son sujet, j’espère aussi pouvoir décrire comment Transparent se positionne à l’avant garde d’une transposition de l’univers du cinéma indépendant vers le genre sériel !
Ce qui suit est un récapitulatif subjectif mais très riche en détails sur ledit épisode ! Il serait fort dommage que vous poursuiviez cette lecture sans l’avoir vu au préalable, surtout qu’il y a matière à révélations. Voilà, vous êtes prévenus ! Sachez à ce propos que je livrais, dans cette même colonne, une présentation inoffensive de la série lors de sa diffusion parmi la seconde vague de pilote en février dernier. Allez donc y jetez un oeil si vous souhaitez savoir si elle est faite pour vous.
Une introduction parfaite
Pour avoir vu ce pilote plusieurs fois, je me dois d’évoquer cet aspect qui me fascine systématiquement, à savoir combien l’introduction de la famille Pfefferman est aussi simple que parfaite ! On les découvre progressivement, par petites touches, avec des situations souvent plus signifiantes que les paroles qu’ils prononcent.
Par conséquent, je ne saurai commenter cette entrée en matière sans respecter scrupuleusement leur ordre d’apparition qui, vous le remarquerez, se fait de la plus jeune vers le plus âgé.
On fait tout d’abord connaissance avec Ali (Gaby Hoffmann), la cadette. Elle se réveille seule avant de retrouver une amie pour une promenade à Griffith Park. Elle lui annonce vouloir écrire un livre assez bancal. Son amie l’encourage mollement et l’on devine déjà qu’Ali est sans emploi, ni même sans but précis dans la vie.
Vient ensuite le tour de Josh (Jay Duplass). Il semble d’abord soucieux puis prend un malin plaisir à réveiller une jeune et jolie blonde (Alison Sudol) qui partage son lit. On apprendra plus tard qu’elle est musicienne et que Josh se trouve être son producteur. Ali aura beau jeu de le taquiner ensuite sur ses goût pour plus jeune que lui.
Et pendant ce temps là, Sara (Amy Landecker), l’ainée, se prépare pour emmener ses enfants à l’école. Plus installée que sa soeur et son frère, elle est entourée d’une employée hispanique mais son mari s’esquive sans même dire au revoir, ce qui en dit long sur l’état de son couple.
En fin de journée, les trois enfants se retrouvent chez leur père. Il les a convié de manière un peu inhabituelle et Josh croit savoir qu’il a un cancer. Il espère même que leur paternel aura la clairvoyance de leur transmettre ses biens avant de décéder pour des raisons fiscales, quelle délicatesse !
Alors que les Pfefferman dévorent sans ménagement leur dîner, on ne sait pas grand chose sur le chef de famille, Mort (Jeffrey Tambor) de son prénom. Il se borne tout juste à préciser qu’il a été éduqué dans une famille juive modeste où l’on mangeait la salade avec les mains.
Alors qu’il souhaite leur dire ce pourquoi il les a convié, Mort craque submergé par l’émotion. Après que les enfants aient habilement – grosse dose d’ironie – suggéré l’hypothèse du cancer, leur père annonce vouloir se séparer de la maison familiale. En ajoutant qu’il la destine à Sara, son mari et ses enfants, Josh s’emporte avant de s’enfuir prétextant un concert à voir. Seule Ali semble s’inquiéter pour son père et lui demande ou il irait habiter ensuite.
Une toute autre personne dans l’intimité
Après une transition pendant laquelle on le voit faire un chèque pour Ali, confirmant ainsi qu’elle est dans le besoin, il y a cette scène centrale aussi bien de par son placement dans l’épisode que pour son importance tout court !
Mort est au téléphone et il avoue à son interlocuteur/trice qu’il n’a pas su dire ce qu’il avait sur le coeur à ses enfants. Après avoir raccroché, il s’installe sur son lit pour lire alors qu’il a enfilé une robe. Il enfin… Elle s’est détaché les cheveux et adopte une pose féminine, la musique d’Edward Sharpe & The Magnetic Zeros se fait entendre :
La musique se poursuit, le morceau prend même toute son ampleur alors que l’on suit Josh, non pas à un concert comme il l’avait prétendu, mais chez une mystérieuse Rita. Laquelle se trouve être à peu de choses près l’exact opposé de sa blonde de musicienne, plus âgée et surtout bien plus ronde. Josh semble s’abandonner complètement dans ses bras, ou plutôt ses jambes.
Le lendemain, on fait la connaissance de Len (Rob Huebel), le mari de Sara. Elle lui parle de Tammy, une lesbienne qu’elle fréquentait dans sa jeunesse et qu’elle a revu à l’école de leurs enfants. Très subtile, son mari se fend d’un “I like lesbians” ! Quelque chose me dit que son avis va vite évoler.
On découvre ensuite le dernier membre de la famille Pfefferman, Shelly (Judith Light), la mère qui vit avec son compagnon (/deuxième mari ?), Ted. Ali vient leur rendre visite et si Ted ne semble plus être en mesure de parler, sa maman, bavarde, parle pour deux !
“I wouldn’t believe a word your father says.” (Shelly)
Si nous avions encore des doutes, la suite se charge de nous les éclaircir. Au centre LGBT de LA, Maura (anciennement Mort donc) assiste à une session de groupe dans laquelle elle confie une anecdote, une interpellation qu’elle a vécue et le malaise prévisible compte tenu de sa pièce d’identité très masculine. A la fin de sa prise de parole, elle avoue ne pas avoir réussi à faire son coming-out auprès de ses enfants mais promet d’y parvenir bientôt.
La séquence est superbe ! Un travelling lent permet de découvrir les autres trans’ assistant au groupe et lorsque la caméra s’arrête sur Maura, l’image fait son effet. Maquillée et d’une tenue bien plus soignée que lors du dîner, elle exprime une joie et une fierté communicative.
Au sujet de ses enfants, elle a cette phrase qui annonce bien tout le fossé qui se présente devant elle :
“They are so selfish. I don’t know how it is I raised three people who can not see beyond themselves.” (Maura)
Et d’eux il est question justement. Sara rencontre la fameuse Tammy (Melora Hardin) à l’école et elle parvient à la convaincre de visiter la maison de son père. C’est que Tammy se trouve être décoratrice d’intérieur, enfin bon, Sara semble plutôt à la recherche d’un autre type de décoration d’intérieur…
Pendant ce temps là, Ali s’offre les services d’un coach sportif qu’elle avait repéré au parc. Elle lui avoue avoir besoin de discipline…
Quand à Josh, il propose à ses musiciennes d’interpréter une reprise de Jim Croce, un titre qu’il avait fredonné un peu plus tôt avec Ali alors qu’ils avaient trouvé le 33 tours dans la collection du paternel.
Par la force des choses
La dernière scène est intense. Sara et Tammy sont irrémédiablement attirées l’une vers l’autre et Maura les surprend dans la chambre à coucher.
Sara : “Dad ?”
Maura : “Hi, girls !”
Fondu au noir puis le générique se déroule sur la voix de Jim Croce :
Comme je le disais en ouverture, revoir ce pilote, c’est s’apercevoir qu’il est la perfection même ! Tout est introduit, les personnages sont si bien caractérisés qu’il se suffirait presque à lui-même.
Il me plaît surtout de voir que Jill Soloway (créatrice de la série) garde une tendresse constante quel que soit le personnage qu’elle décrit. Il serait tentant de donner un éclairage surdimmensionné sur Maura et de la même manière d’enlaidir les enfants. Ce n’est pas le cas, malgré leurs défauts, les enfants restent équilibrés et portent chacun des réflexions qui auront leur importance.
Je suis également totalement conquis par la forme. Soloway s’empare de la banlieue est de Los Angeles avec un rythme et des couleurs qui s’éternisent délicieusement sur ma rétine.
Avec beaucoup de simplicité, elle parvient toujours à trouver la distance juste entre ses comédiens et la caméra.
Je m’arrête ici pour le moment ! La suite devrait me permettre d’aborder tous les détails et notamment la performance des actrices et acteurs.
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Observations diverses et variées :
- Bienvenue dans cette série de récapitulatifs pour Transparent ! Vous savez sûrement que la saison a été publiée simultanément. Mais en grand opposant à la doctrine du Binge-watching, je vous proposerais ces récap’ à un rythme hebdomadaire ! Enfin je vous dis ça mais je dois bien avouer que j’éprouve toutes les peines du monde à ne pas enchaîner tous les épisodes, séance tenante…
- Pour ceux qui auraient vu le pilote tel qu’il avait été diffusé lors de la deuxième vague de pilotes en février, il faut préciser qu’il y a quelques petits changements dans la version finale rééditée. Tout d’abord, ce pilote est augmenté d’un générique, sorte de patchwork vidéo reprenant des scènes familiales qu’on devine comme étant celles de l’enfance des trois enfants.
Et puis surtout, il y a quelques changements de casting. Le plus notable étant celui de Tammy mais l’on peur citer également l’amie d’Ali lors de leur ballade au parc ou encore son coach sportif. - Je vais tenter de faire la distinction dans les pronoms que j’utilise lorsque je parle de Mort/Maura. Je vais également tenter de faire attention aux appellations trans/transgenre/transexuelle. Pour l’instant j’essaie de me référer à cette définition mais si vous avez des remarques avisées, elles seront les bienvenues !
- Enfin petit détail amusant : on remarque que le logo Amazon jusqu’ici toujours accompagné de la mention « comedy » ou « drama » est ici remplacé par « Originals » ! Ce changement est tout à fait significatif pour Transparent qui prend la trajectoire d’un dramedy pur jus !
Visuels : Transparent / Amazon
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Musique :
Edward Sharpe & The Magnetic Zeros “Mayla” (2012 Vagrant Rec.)
Jim Croce “Operator (That’s Not the Way It Feels)” (1972 ABC Rec.)
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