(Amazon) saison 1 en dix épisodes et saison 2 prévue –
En préambule de mon récapitulatif de l’épisode 5, je vous parlais d’un débat animé entre Jill Soloway (créa. de Transparent) et Jenji Kohan (Weeds, OITNB), la première affirmant qu’elle souhaitait engager une scénariste trans, quitte à la former si nécessaire, s’opposant ainsi à la deuxième qui estime que le talent doit primer sur la condition.
On apprend cette semaine que la trans (homme vers femme) souhaitée par Soloway a été choisie. Il s’agit d’Our Lady J, une chanteuse, pianiste de formation, qui pratique aussi la comédie musicale. En apparence, ce choix semble quelque peu “people” mais nous verrons bien si son apport s’avère déterminant.
Le huitième volet dont il est question ici s’attaque justement à la définition même du transgenre, notamment via son opposition avec le travestissement. Direction l’an de grâce 1994, juste après le traditionnel avertissement.
Vous n’avez pas vu ce “Best New Girl” ?! Sachez que j’en livre tous les détails dans ce qui suit. Vous êtes prévenus !
“I’m going to make the best of a bad situation”
Depuis le deuxième épisode, les flashbacks ont rythmés la série. Principalement concentrés sur la personne de Mort/Maura, ils se sont progressivement ouvert au reste de la famille Pfefferman pour finalement introduire cet épisode entièrement situé en 1994. Après le dénouement dramatique du volet précédent, ce contre-coup temporel est une diversion un peu facile. Pourtant, loin d’être anodin, il offre quelques unes des plus belles scènes de la saison !
Nous retrouvons les Pfefferman là où on les avait laissés. La Bat Mitsvah d’Ali est annulée et Mort en profite pour s’éclipser, faisant croire à Shelly qu’il va assister à une conférence ; rappelons qu’il est professeur en sciences politiques.
En réalité, il rejoint Mark et le duo se rend au Camp Camellia qu’ils avaient évoqué durant l’épisode 6. Le camp organise un week-end dedié au “crossdressing”. Alors qu’ils font leur entrée au milieu des bungalows, de nombreux travestis déambulent autour d’eux ajoutant à leur excitation !
Le générique prend la suite et pour accompagner le flashback l’accompagnement au piano – signé Dustin O’Halloran – habituel est remplacé par le très approprié “Oh, Sister” de Bob Dylan dont voici quelques paroles :
Oh, sister, when I come to lie in your arms
You should not treat me like a stranger
Our father would not like the way that you act
and you must realize the danger
“It was the biggest camel toe I’ve ever seen.”
Abandonnée, Shelly s’enfuit chez la tante Judy (sa soeur ?) abandonnant ainsi à son tour ses enfants. Judy (Caroline Aaron) l’attend avec une bouteille de vin blanc pour la réconforter et après avoir évoqué une thérapie de groupe, elle n’hésite pas à lui conseiller d’aller voir ailleurs. Shelly mentionne justement un certain Eddie Paskowitz qui lui tournerait autour…
Nous y voilà ! Les épisodes précédents soulevait la question de la séparation du couple Pfefferman. Il semblerait que nous soyons à la croisée des chemins, ceux pour lesquels Shelly et Mort empruntent des directions différentes. Sans préjuger de la suite, leur histoire est décrite avec beaucoup de délicatesse.
Du côté du Camp Camellia, Maura et Marcy se présentent à leur première soirée. L’ambiance est délicieusement disco ! la preuve avec les anglais de Freeez :
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M&M s’acoquinent avec un groupe qui leur explique que le festival a bien évolué – les participants ont désormais de l’eau chaude ! – et, plus étonnant, les femmes y sont tolérées puisque Jackie (Pat Towne) leur présente son épouse Connie (la toujours excellente Michaela Watkins).
Puis la musique reprend ses droits grâce au classique ultime des Deee-lite :
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“Just seeing you together, it’ gross”
Pendant ce temps là, les trois enfants Pfefferman vivent leurs vies comme ils l’entendent. Sarah qui était censée surveiller son frère et sa soeur est la première à quitter les lieux pour aller participer à une manifestation. Puis c’est Rita qui passe chercher Josh ensuite. Seule Ali semble devoir rester dans la maison familiale, du moins pour l’instant.
Un peu plus tard, alors qu’elle fusionne avec le canapé du salon, une employée d’un service de traiteur vient apporter des victuailles prévues pour la Bat Mitsvah annulée. Cette dernière n’est pas pressée de repartir et cherche à comprendre comment Ali s’y est prise pour annuler l’événement. La jeune Pfefferman prétend alors ignorer les paroles de la chanson rituelle avant de l’interpréter – avec une certaine classe, il faut bien le reconnaître – en se dressant sur la table basse.
“We are cross-dressers, but we’re still men.”
Au Camp Camellia, Jackie évoque le cas d’une certaine Ramona qui aurait été surprise en train de s’injecter des hormones. Jackie et les habitués du camp (ainsi que Marcy) sont horrifiées par la chose. Maura, quand à elle ne moufte pas mais son désaccord se lis sur son visage.
Cette anecdote est ô combien importante ! Elle nous livre deux enseignements forts sur la question trans. La première étant que les transsexuels ont été marginalisés y compris au sein de la communauté travestie. La solidarité est peut être de mise à notre époque mais ce ne fût pas toujours le cas comme le démontre cette séquence.
Et puis, dans notre vision limitée qui est celle des cis-genre (par opposition au trans donc), cette scène ne nous permet plus d’ignorer le gouffre qui peut exister entre travesti et transexuel.
Par la suite, Connie – vous ai-je déjà dit tout le bien que je pensais de Michaela Watkins ? – attristée, tout comme Maura, soutient également Ramona la bannie. Marcie et Maura s’opposent sur la question. Oh, oh, y aurait-il de l’eau dans le gaz entre M&M ?
“I love beer”
Pendant ce temps là, les enfants de Maura se rappellent à notre bon souvenir ! Sarah fait la rencontre d’une certaine Cindy pour laquelle il n’est pas difficile de voir qu’elle est lesbienne. De son côté, Josh se fait balader par Rita, dans les deux sens du terme…
Et Ali se fait déposer à la plage par Jules, la serveuse du traiteur. Elle y rencontre Patrick (James Frecheville) qui ne veut pas lui prêter sa maquette d’avion téléguidé mais lui offre néanmoins de boire une bière. Il faut dire qu’Ali a prétendu avoir 17 ans !
Dans la cabine de M&M, c’est plutôt le Martini qui se déguste et, entre deux verres, Connie explique avoir été en dépression avant que Jack/Jackie fasse son coming out. On a du mal à la prendre au sérieux tant elle parait joviale ici. Pour un peu, on pourrait presque croire ici que Soloway et sa bande tentent de nous faire croire que le coming out peut aussi être une bénédiction pour la femme !
Quoi qu’il en soit, Connie et Maura s’entendent très bien, dansent ensemble sans retenue et au grand désarroi de Marcy qui ne pense qu’à la soirée du concours (de la plus belle travestie, je suppose). Maura met littéralement Marcy à la porte avant de fusionner avec Connie au son d’un tango de Mucca Pazza.
“You’re a cunt!”
Le lendemain, le divorce entre Marcy et Maura se confirme. Marcy est redevenu Mark alors que Maura souhaite prolonger le plaisir d’être une femme en portant ses vêtement quelques heures de plus. Il semble plus qu’évident que leurs chemins se séparent ici. Maura manifeste ici son désir de ne pas se contenter du travestissement et Marcy ne l’accompagnera pas plus loin.
L’épisode se termine avec Ali et Patrick. Il ne s’est rien passé entre ces deux là bien qu’Ali l’ait sûrement désiré. Seulement voilà, Patrick a la tête sur les épaules et s’est bien rendu compte qu’il avait affaire à une gamine. Vous me direz, cela ne semble pas arrêter Rita qui ne se gêne pas pour dévorer Josh. Oui, mais voyez vous, c’est un garçon…
Sauf que quand on voit dans quel état il est plus tard, on ne peut s’empêcher de penser que les parents Pfefferman ont effectivement une belle responsabilité quand à ses dérives.
Et des parents Pfefferman il sera question dès le début de l’épisode suivant ! Vite la suite…
Quelques moments forts :
- Marcy qui bascule en mode paternel au téléphone pour encourager son fils à ne pas se laisser marcher sur les doigts (“Man-up”) auprès de son coach avant de reprendre une attitude féminine et ses “Okey-doke” l’instant d’après. Bradley Whitford nous livre là une belle performance !
- La jeune Ali et Patrick batifolent sur la plage puis sous un abri. Alors que les deux sont attirés l’un vers l’autre, les choses sérieuses n’auront pas lieu. Il y alors ce passage où la Ali période moderne coexiste avec le couple, recevant même un baiser de l’homme en salopette. Projection ou fantasme, c’est une scène brillante de toute façon !
Quelques observations diverses et variées
- Lorsque Mort s’esquive au début de l’épisode, il se justifie auprès de sa femme en prétextant une conférence durant laquelle il va être question des Rosenbergs. Le couple fût exécuté en 1953 après avoir été accusés d’espionnage pour le compte de l’union soviétique. Ils auraient tenté de communiquer des détails sur la bombe atomique.
- Lorsque Sarah part manifester, elle explique avoir été contacté par des connaissances à l’UCSB. Il s’agit de l’Université de Californie basée à Santa Barbara. Elle annonce ensuite vouloir soutenir des protestations contre une réglementation abusive à l’encontre des syndicats (“abusive labor practices”).
Visuels : Transparent / Amazon Studios
Musique :
Bob Dylan “Oh, Sister” (1976 Columbia Rec.)
Freeez “IOU” (1983 Beggars Banquet Rec.)
Deee-lite “power of love” (1990 Elektra Rec.)
Mucca Pazza “Tube Sock Tango” (2012 Electric Cowbell Rec.)
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