The Last Man on Earth s01e13 « screw the moon »
saison 1 en 13 épisodes et saison 2 prévue (Fox)
“Too many people side by side, got no place to hide”. The Last Man on Earth propose une réponse à cette inquiétude ochlophobe entonnée par les Kinks (Supersonic Rocket Ship), que l’on entend justement au générique de fin de cet ultime épisode. Et si nous étions seuls sur terre ?!
Je poursuis donc ici un triptyque initié avec Man Seeking Woman (FX) et qui se terminera par Unbreakable Kimmy Schmidt (Netflix). Un trio détonnant aux concepts disruptifs qui renouvelle brillamment le genre de la comédie en ce début 2015.
J’évacue le plus possible l’intrigue dans ce qui suit pour éviter toute révélations intempestives mais en raison des spécificités de ce récit, j’évoque plusieurs directions que vous pourriez ne pas avoir envie de lire si vous ignorez tout de la série. Revenez donc ici après avoir vu quelques épisodes si vous souhaitez découvrir la série sans à priori !
En 2020, Phil Miller parcourt le pays en long et en large. Un an après les ravages d’un virus, il semble être le seul survivant sur la planète. Résigné après ses recherches infructueuses, il décide de retourner dans sa ville de naissance : Tucson, Arizona. Il ne se doute pas encore que ses messages indiquant “vivant à Tucson” placé sur des panneaux publicitaires vont lui amener de la compagnie…
L’antihéros comique
The Last Man on Earth est un exemple supplémentaire et remarquable de l’influence des chaînes du câble – et d’autres obscurs réseaux… – sur la politique éditoriale actuelle des networks. La Fox nous livre ici une comédie sur un sujet sombre avec une forte dose de cynisme. Le personnage principal est criblé de défauts. Et puis la saison composée de treize volets est conçue comme un tout ; la série est donc totalement feuilletonnante.
Bref, voilà des caractéristiques bien rares pour une comédie de network et c’est pourtant avec ces seules idées qu’une commande straitgh-to-series y a vu le jour.
Le pari est d’autant plus risqué que Phil Miller a tout faux. Après un départ où l’on ne peut que ressentir de l’empathie devant sa solitude, l’arrivée de congénères qu’il n’attendait plus le place sous un jour exécrable. Non seulement il s’enlise dans une attitude odieuse mais cette posture ne lui réussit en rien. Pourtant, il renchérit de plus belle sur des manigances grossières et pitoyables au grand désespoir du téléspectateur.
Ne cherchez pas plus loin, il s’agit là du grand défaut de la série. Will Forte (Miller) parvient souvent à faire naître l’humour de sa condition d’abruti mais il est difficile d’adhérer au parcours d’un personnage dont les agissements sont néfastes et, de surcroît, sans qu’il puisse en tirer un quelconque profit.
Un trio talentueux
L’exécution est pourtant impeccable. L’idée de départ aurait germé dans l’entourage d’un duo très en vogue : Phil Lord et Christopher Miller (Remarquez le porte-manteau entre leurs noms qui nomme le héros de la série). Le duo confie alors l’idée à leur grand ami, Will Forte. Acteur régulier du Saturday Night Live (MacGruber), Forte est aussi un habitué de l’écriture pour la comédie (3rd rock from the sun, That ‘70s show) et il développe le concept avant de le proposer à des diffuseurs. A sa grande surprise, la Fox adhère complètement au projet et Forte assemble alors une writer’s room de choix*. Mais les très occupés Lord & Miller (Tempête de Boulettes géantes, Lego Movie, 21 & 22 Jump Street) se sont également pleinement investi dans la série. En plus d’être producteurs exécutifs, il signe la réalisation des deux premiers épisodes, une entrée en matière violemment burlesque. Un élan nécessaire pour permettre l’assimilation d’un personnage décidément compliqué.
Le trio a su imposer son oeuvre. A titre d’exemple, il a fallu batailler pour que le network ne révèle pas la pluralité du casting. De leur point de vue (celui des décideurs networkiens), il est d’usage d’annoncer toutes les composantes d’une distribution pour communiquer – et accessoirement se faire mousser – sur les talents qui composent leurs nouvelles productions. Mais Forte et ses producteurs ont tenu à maintenir le secret sur les futurs rencontres de Miller et c’est ainsi que le public a pu profiter pleinement des rebondissements prévus.
Une réflexion sur l’individualisme
Car The Last Man on Earth ne se détourne pas de ses parti-pris de départ. Le point de vue reste celui de Phil de bout en bout et si l’apocalypse n’a laissé aucun cadavres dans les rues – nous ne sommes pas dans The Walking Dead – les enjeux sous-jacents n’en sont pas pour autant édulcorés.
Phil ne s’épargne notamment aucune sombre pensée et la perspective d’assouvir toute exigence matérielle ne lui apporte aucun réconfort.
Mais plus intéressant encore, le retour de Phil à la vie sociale nous renvoie un miroir individualiste sans concessions. Jusqu’à quel point peut-on pardonner le comportement d’un homme privé de tout contact social sur une longue durée son comportement auto-centré lorsqu’il se trouve à nouveau en communauté ? Comment justifier qu’il semble se détourner de liens dont il a si longtemps été privés ?
Ces questions ne sont pas vraiment celles qu’on attend d’une comédie. La tragédie façonne pourtant souvent le meilleur de la comédie et The Last Man on Earth mérite amplement notre curiosité pour cette seule ambition.
Il faut également s’incliner devant la Fox qui mise à nouveau sur la série puisqu’elle sera programmée pour sa saison 2 non plus à mi-saison mais dès la rentrée prochaine en fin de sa soirée comédies du dimanche.
(*) : John Solomon (SNL), Emily Spivey (Up All Night, SNL), Liz Cackowski (SNL), Andy Bobrow (Malcolm, Community), Erik Durbin (3rd rock from the sun, American Dad).
Retrouvez ce billet dans la sélection hebdomadaire Séries Mania.
Visuels & vidéo : The Last Man on Earth / The Si Fi Company / Lord Miller / 20th Century Fox Television
Très bon article ! Je suis d’accord avec toi concernant le personnage de Phil. Le dernier épisode promet de nouvelles perspectives pour la saison 2 mais je ne sais pas si je serai au rendez-vous..
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oui, l’ouverture [Spoilers] leur permet de repartir presque à zéro. Mais je trouve intéressant qu’il parte en couple avec Carol et non seul… [/Spoilers].
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Ton analyse est excellente et c’est pour cela que la série a du mal à séduire, parce qu’on s’attend à de la comédie de base et finalement on creuse plus loin et la couche supérieure censée être drôle peut paraître un peu lourdingue. En plus, je trouve qu’ils arrivent à nous faire ressentir pour les personnages ce que les autres éprouvent pour eux. C’est peut être pour cela qu’après avoir eu envie d’étrangler Carol, j’ai fini par beaucoup l’aimer ! 😉
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Dans ce genre de situation, n’importe quelle autre comédie aurait dévié du Point de vue de Phil pour celui d’un des autres personnages afin de distiller de l’humour régulièrement. A mon humble avis, les scénaristes se montrent plutôt courageux de rester sur Phil…
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